Belgique/ Burkina Faso: les ressemblances

Il y a presque un an maintenant, j’arrivais pour m’installer au Burkina Faso. Quelques semaines après notre arrivée, sur les routes du pays, Arnaud, mon compagnon de voyage s’exclamait «  en fait, le Burkina et la Belgique, c’est pareil ! ». Cette remarque était plus particulièrement adressée aux routes entourées d’habitations sur tout leur long. En Belgique, le bâtit est dense, il est donc rare de trouver un tronçon de route sans habitations autour et au Burkina, être « à côté du goudron » est recherché pour la facilité de déplacements que cela donne, les goudrons sont donc longés d’habitations et autres buildings.

En réalité, et malgré des histoires vastement différentes, il semble que la Belgique et le Burkina partagent d’autres similitudes troublantes. Tour d’horizon :

Pays plat et plat pays

Avec un point culminant  à 694 mètres pour la Belgique (signal de Botrange)  et 747 mètres pour la Burkina Faso (Tenakourou), les deux pays partagent un paysage assez plat, fait de plaines  et de quelques collines vers le sud ( ouest au Burkina, est en Belgique). Ainsi on pourrait imaginer que la régions des Cascades au Burkina soit l’équivalent des Ardennes belges.

Par ailleurs, les deux pays se trouvent géographiquement au centre de leur région et ont été le lieu de rencontres mais aussi de passage de mouvements migratoires, de conquêtes voisines. Cette histoire à la croisée des chemins laisse des traces dans la culture nationale.

Paysage burkinabé

Une relation compliquée aux voisins

 Les deux pays semblent avoir une relation complexe à leurs voisins.

Ainsi en Belgique, le sud du pays ( Wallonie) va consommer beaucoup de culture ( musique, cinéma, théâtre, télévision, humour) du pays voisin la France dont il partage la langue et le nord du Pays ( Flandre) consomment également  la culture néerlandaise des Pays-Bas ( bien que dans une moindre mesure). Au Burkina Faso, on va entendre de la musique malienne, regarder des séries sénégalaises, voir des humoristes ivoiriens, etc.

Pareillement, on va retrouver beaucoup de belges émigrés chez ses voisins et des ressortissants des  pays voisins en Belgique. Ainsi quelque unes des mes ami(e)s sont en couple avec des Français ou sont françaises elles-mêmes et d’autres sont parties faire leur vie en France. Ici à Bobo-Dioulasso, je croise un nombre important d’Ivoiriens ou de burkinabé de Côte d’Ivoire ( Burkinabé issus de la diaspora et nés en Côte d’Ivoire). Et l’expression « je vais à Abidjan pour x ou y » sonne à mes oreilles très similaires à «  je vais à Paris », notamment dans l’industrie de la Culture.

Ce métissage transfrontalier s’accompagne d’une bonne dose de taquineries et petites moqueries : « mais bon, tu sais, il est français/ivoirien », «  oui mais tu sais , les néerlandais sont radins ».

Ces taquineries se muent parfois en méfiance vis-à-vis du voisins et me semblent parfois révéler un plus ou moins léger complexe d’infériorité. Une ambiguïté que je retrouve dans les deux pays : « on doit être fier d’être belge/ burkinabé et promouvoir nos produits nationaux » sans savoir se défaire totalement de regarder le journal de TF1 ou d’écouter le dernier single sortis d’Abidjan.

La haine/ amour de la France

Ce rapport ambigu s’illustre encore plus dans le rapports avec la France. Attention, ici l’histoire de la Belgique et du Burkina n’est pas comparable, j’en suis bien consciente. L’expérience de la colonisation et de l’exploitation au Burkina étant bien plus aiguë et récente. Il n’est pas dans mon idée de comparer des histoires qui ne sont pas comparables mais je ne peux m’empêcher de remarquer une similitude dans le rapport à la France . Similitude devenue notable lors de la récente élimination de la France à l’Euro de football, fêtée par mes amis belges francophones mais aussi par mes amis burkinabé.

Ainsi la France est décriée au Burkina pour son ingérence dans les affaires du pays et sa certaine arrogance. En Belgique, c’est surtout l’arrogance perçue des français et leur chauvinisme qui est critiqué. Ce qui n’empêche pas les deux pays de regarder des émissions françaises, envier le « chic » à la française en cuisine ou en mode et de lorgner sur l’éducation française.

Paysage belge

Le multilinguisme

Les deux pays ont un point commun important qui me parait influencé fortement la manière d’être de leur population : le multilinguisme.

En Belgique, les langues officielles sont le néerlandais, le français et l’allemand mais on retrouve aussi en Flandre une série de dialectes flamands encore pratiqués et une communauté internationale à Bruxelles, Anvers, et autres grandes villes où sont pratiqués l’anglais mais aussi l’arabe, le turc, l’espagnol, etc.

Au Burkina, la langue officielle et administrative est le français mais le moré, le dioula et le fulfulde sont reconnues comme langues usuelles en plus des 60 et quelques langues parlées des différentes ethnies du Burkina.

Ainsi dans les deux pays et selon la région du pays où on se trouve, on va retrouver des panneaux bilingues qui indiquent en deux ( voir trois) langues des indications simples.  Les discours officiels sont régulièrement traduits ou, de manière encore plus typiques des pays multilingues, prononcés presque indifféremment dans une langue puis dans une autre, dans un mixte plus ou moins égal. La population et le public pouvant ainsi comprendre l’entièreté ou une partie de ce qui est dit sans trop s’offenser de la partie non comprise.

L’art du compromis

Ce multilinguisme est l’expression d’une multiplicité de cultures au sein d’un même pays. Afin de garantir une certaine cohésion, le décideur politique ou économique, belge ou burkinabé qui se veut national se doit ainsi de contenter au maximum une diversité de populations parfois aux intérêts variés. Il va devenir maitre dans l’art de faire des compromis pour satisfaire le plus grand nombre. Des « compromis à la belge » qui parfois ne mécontentent personne mais qui en réalité ne satisfissent réellement personne non plus.

Cet art du compromis donne de l’extérieur une impression d’une certaine mollesse. Pas de grande décisions fracassantes en Belgique ni au Burkina. Et la population, habituée elles-aussi à cette importance de satisfaire des pans variés de population est perçue comme peu réactive. Ainsi, j’ai pu entendre des belges se plaindre du manque de réaction de la population belge « De toutes façons, ici on accepte tout » et des burkinabé  se plaindre du manque de tonus de l’opposition de leurs compatriotes : «  on est un pays de moutons ».

L’accueil

Cette mollesse relative est accompagnée d’une autre conséquence plus radieuses d’être un pays multiculturel : le sens de l’accueil.

Très visible pour moi en arrivant au Burkina où l’hospitalité n’est pas un vain mot et où l’accueil de l’étranger est un (voir le) des plus agréables que j’ai rencontré, ce sens de l’accueil m’a été aussi témoigné vis-à-vis de la Belgique par des étrangers venus s’installer en Belgique ou étant passé par là.

Accueillants, sympathiques si un peu mous, les belges et les burkinabé semblent ainsi partagés une certaine bonhommie. Et c’est bien agréable que de vivre et être associée aux pays des bons hommes.

Définition de Bonhommie ( Larousse) : « Bonté du cœur, unie à la simplicité des manières ».

un même soleil

Une réflexion sur “Belgique/ Burkina Faso: les ressemblances

  1. Bonjour Mayliss, c’est toujours aussi intéressant, tes aperçus culturels, et la diversité de tes angles d’attaque permet d’apporter chaque fois quelque chose de neuf.
    Merci et au plaisir
    Carmelo

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